
La route s’arrêtait net au portail rouillé, avalé par les ronces. Au-delà, les Thermes de Roche-Clair, abandonnés depuis les années 70, dormaient sur une colline veinée de quartz. Sur les forums, on racontait qu’on y soignait les douleurs avec des bains minéraux… et des pierres chauffées.
Parfait pour une enquête façon Ghost Adventures — et, cette fois, on allait tenter un protocole inédit : utiliser un bracelet en pierres naturelles comme déclencheur.
Nous étions trois : Inès (audio), Malik (caméra), et moi. Minuit quatorze. L’air sentait le calcaire et la poussière humide. On installe le REM-Pod au comptoir, la caméra thermique face aux escaliers, un K-II dans l’ancienne salle d’hydro.
Je glisse le bracelet — ambre, agate mousse, turquoise, cristal de roche — autour de mon poignet droit. « Si quelque chose vit encore ici, servez-vous de ces pierres pour nous répondre. »
Les couloirs de sel et d’échos
Les lampes accrochent un chariot de balnéo renversé, un tableau d’ordres de soins cloué de travers. Dans la Spirit Box, du souffle… puis un mot, arraché au vacarme : « Pierre. » On échange un regard : on tient un fil.
Dans l’ancienne salle de repos, le K-II s’allume en orange. Je m’assois, poignet posé sur la table. « On dit que ces pierres apaisaient la douleur. Est-ce vrai ? » Deux coups secs dans le mur répondent, espacés, sans écho parasite. La thermique, elle, dessine un couloir de froid qui glisse vers la balnéo.
La baignoire n°7
🔮 Es-tu un vrai connaisseur des pierres et cristaux ?
C’est la pièce la plus froide du site : carrelage bleu, baignoires en fonte, soupirs de canalisations. Sur le rebord de la n°7, nous posons un galet de quartz clair et, à côté, le bracelet. Inès garde le micro ouvert. « Si vous en avez besoin, approchez-vous. »
Le thermomètre IR descend : 11,1°… 10,3°… 9,6°. Le REM-Pod, resté à l’entrée, se met à pulser trois fois, s’arrête, puis recommence. La Spirit Box crache : « Douleur. » Et, très bas, « prenez. »
Je retire lentement le bracelet et le pose dans la baignoire vidée. Les perles s’immobilisent. Rien. Puis l’ambre se met à vibrer, minuscule cliquetis contre la fonte, comme un ongle sur un verre. Sur la SLS, Malik capture une silhouette compacte, agenouillée au niveau du rebord. Elle tend un bras. Le K-II passe au rouge et coupe net.
La mémoire du quartz
Sous les thermes, un ancien tunnel d’acheminement de blocs minéraux. On y descend avec prudence. Les murs miroitent de paillettes. Malik filme, Inès lance : « On raconte qu’une hydrothérapeute, Agathe, utilisait les pierres pour “fixer la douleur” avant les bains. Agathe, es-tu là ? »
Silence… puis un souffle de pas sur le gravier. La Spirit Box décroche « ici », suivi d’un mot haché : « garde. » Le K-II, posé sur un madrier, reste muet — jusqu’à ce que je reprenne le bracelet en main. Pic à 20 cm de mon poignet. On n’a pas de ligne haute tension, pas de route au-dessus. Et pourtant l’aiguille grimpe, uniquement quand les perles touchent la peau.
Je pense au quartz piezo de nos montres : pression, charge électrique. Et si cette colline servait d’antenne ? Superstition, science, ou… autre chose ? On continue.
Le couloir des brumes
En remontant, une brume basse s’effiloche depuis les douches. La thermique dessine une forme penchée près du banc. J’approche, bracelet tendu. « Si ces pierres vous ont soulagé, montrez-le. » L’agate mousse se réchauffe contre ma peau — rien d’exotique, juste cette impression triviale mais nette qu’elle capte la température plus vite que les autres.
Le REM-Pod hurle une seconde, puis laisse un battement régulier, presque cardiaque.
— « Agathe, tu soulageais les malades ? » demande Inès.
— « oui », souffle la Box, parfaitement distinct. Puis : « rends-le. »
Quoi rendre ? Malik zoome sur une plaque scellée : Baignoire 7 — protocole litho 1958. Une initiale gravée : A. On retourne dans la salle.
Le troc
J’accroche le bracelet à la bonde de la baignoire n°7. « Si on te le laisse, donne-nous un signe clair. » Deux coups sous la fonte. On recule. Je m’attends à un bruit, à un spike. À la place, c’est… une odeur qui arrive. Chaude, résineuse. L’odeur d’ambre chauffé. Impossible ici, sans source. Inès enregistre, la SLS affiche brièvement une silhouette à hauteur de la bonde — puis plus rien. Le REM-Pod retombe au silence.
On reste cinq longues minutes à écouter un bâtiment respirer. Puis la Spirit Box, enfin : « merci. » Un seul mot, propre. Comme un reçu.
Débrief : quand les pierres parlent… ou nous parlent
Au visionnage, on voit une suite de coïncidences qui s’alignent trop bien : mots pertinents, pics EMF corrélés au bracelet, silhouette au bord de la baignoire, odeur d’ambre. On pourrait expliquer mille choses : canalisations, courants d’air, propriétés électriques du quartz, autosuggestion.
Mais il reste ce moment — vous le verrez sur l’audio brut — où un « merci » atterrit exactement quand nous décidons de laisser le bracelet.
Était-ce Agathe, la soignante qui « gardait » la douleur dans les pierres avant de la dissoudre dans l’eau minérale ? Était-ce la colline elle-même, saturée de quartz, qui amplifiait nos appareils et nos attentes ? On ne sait pas. On sait juste qu’en sortant, l’aube rosissait les vitres cassées, et mon poignet, sans bracelet, s’est senti soudain plus léger — ou bien c’est mon esprit.
Une chose est sûre : aux Thermes de Roche-Clair, les pierres naturelles n’ont pas seulement soigné. Elles ont répondu.